Alors pour être absolument honnête, quand Guy m’a téléphoné pour me proposer de faire un cross dans le parc de la Villette pour soutenir le docteur Tung Aung, un prisonnier politique Birman, soutenu par la section locale d’Amnesty International, il y a eu comme un petit flottement, à peine perceptible, juste le temps de recentrer mes chakras et de répondre par un « mais oui, absolument, pourquoi pas ? », tout à fait approprié à la situation.
Une heure plus tard en découvrant sur leur site qu’il s’agissait de courir à huit reprises sur le triangle formé par trois artères en bitume, qu’il y avait seulement 30 engagés sur la précédente édition et qu’il fallait être sur place à 9h du matin, j’admets avoir laissé échappé un long soupir. Mais bon, une bonne action, un petit footing pour aller à la Villette qui se trouve d’ailleurs sur une des mes boucles favorites du dimanche matin, une petite coursette au saucisson (sans saucisson) et un coup de tramway pour rentrer, tout cela n’était pas si mal. Je l’ai donc ajoutée à mon agenda avec, finalement, assez d’enthousiasme.
8 km, c’est un peu court pour une sortie dominicale et je décide donc de m’y rendre en trottant, ce qui me permettra d’avoir un long échauffement qui ne sera pas du luxe au vu de la température franchement glaciale. Comme ces derniers temps je recommence à bien m’entraîner et que j’ai enfin retrouvé mon poids de forme (ou presque), c’est avec une certaine décontraction que je déroule les quatre petits kilomètres de descente qui me séparent du parc. Je m’inscris en 10 secondes après avoir simplement donné un nom et un prénom (un peu comme à la légion, mais en plus fun) et m’être acquitté d’un droit de participation de quelques euros.
En fin de compte, entre les juniors et les deux courses il y a bien plus de monde que je ne l’avais imaginé et je m’aligne donc au milieu d’une bonne centaine de coureurs. Comme j’aime de moins un moins les courses courtes, je ne suis pas décidé à casser la baraque mais pour autant, pas non plus là pour la jouer footing. On va donc tenter de maintenir un petit 12 km/h tout du long et d’accélérer un peu pour essayer d’emballer le tout en moins de 42 minutes si possible.
L’organisation est très artisanale mais ça n’est pas bien grave car tout cela est très bon enfant. Ça cafouille, ça blablate puis c’est parti.
Nous partons beaucoup trop lentement, Guy a décidé de ne pas courir pour lui mais de me servir de lièvre mais comme nous sommes partis en queue de peloton nous avons un peu de mal à nous mettre en mouvement. Après un premier kilomètre couru en plus de 5’30, je parviens enfin à me caler sur mon allure 10 km et à la tenir à peu près. J’ai beau être en forme, j’estime ne pas encore avoir retrouvé mon niveau d’il y a deux ans et ne pas être capable de courir au-delà de 12 km/heure et du coup, nous papotons et faisons les idiots devant l’appareil photo.
Comme il y a là des coureurs qui ne font que 4 tours, des enfants, des dizaines de joggeurs de passage, il est pratiquement impossible de savoir qui en est où. Nous reprenons des tours à des coureurs du 4 km mais les premiers nous mettent des mines. Bref, nous essayons tant bien que mal de gagner des places mais sans vraiment savoir si les personnes que nous doublons sont vraiment devant nous, ni même si elles participent vraiment à la course. Nous regagnons quand même du terrain et reprenons un par un les clampins qui nous passent à portée de basket.
Enfin… pas tous car les meilleurs continuent à nous mettre un tour dans la vue ! Plus démoralisant encore, vers le milieu du 4e tour, nous parvenons à recoller un gamin qui doit avoir à peine 12 ans mais lorsqu’il accélère pour préparer son arrivée, nous ne pouvons que constater en pestant que nous ne parviendrons jamais à le rattraper.
Les tours s’enchaînent à bon rythme mais à 500 mètres de l’arrivée, j’ai un petit coup de moins bien et au moment d’accélérer je ne parviens pas à pousser mon effort alors je laisse Guy filer car un coureur en a profité pour nous repasser devant. Je trouve quand même un peu de jus au fond des chaussettes pour accélérer sur les 100 derniers mètres et être beau sur la photo mais sans parvenir à rattraper Guy. Je termine 21e sur 61 soit mon meilleur classement depuis des lustres. Y’a pas de mystère, pour gagner des secondes, faut courir léger.
Voila, j’ai bien couru, j’ai envoyé une carte postale au président birman pour exiger la libération du docteur Aung, signé une pétition pour soutenir les femmes agressées sexuellement en Égypte, bu du thé à la menthe et puis je me suis rentré après avoir passé, je dois dire, un excellent moment.
Et comme courir pour la Liberté c’est deux fois par an, j’ai hâte d’être en avril pour recommencer !
© crédit photo : Amnesty International Paris 19e