Triathlon sprint du Nautil 2025

Et de trois 🙂

Jeudi, je me suis aligné au départ d’un petit triathlon au fin fond de nulle part, qu’en temps normal je n’aurais même pas pris la peine de vous raconter mais qui a été le théâtre de la désormais traditionnelle petite passe d’armes qui m’oppose à un pote de ma fille qui s’est mis en tête, ne me demandez pas pourquoi, de me battre un jour sur un triathlon.

En théorie, c’est un objectif tout à fait atteignable mais qui tout de même demande un petit peu d’agilité dans les quatre sports qui composent le triathlon. Vous avez bien lu, j’ai écrit quatre sports et ce n’est pas une faute de frappe mais j’y reviendrai plus tard.

Les potes de mon aînée sont, pour beaucoup, des sportifs aguerris. Plusieurs d’entre eux se sont mis à courir pendant le confinement et certains y ont pris gout. Dans l’ensemble ils courent tous assez vite, plus vite que moi en tout cas. Et pour certains, l’écart est tel qu’il n’y a pas de rivalité possible. Sur triathlon, c’est un peu différent car on réussit généralement mieux en étant moyen dans les trois sports qu’excellent dans l’un et très mauvais dans les deux autres.

Lorsque j’ai débuté le triathlon, j’avais la passion et la ferveur des nouveaux convertis. Je passais donc mon temps à essayer de convaincre tout le monde d’essayer, avec un succès assez relatif. Mais en 2023, j’apprenais avec beaucoup d’enthousiasme qu’un des potes de ma fille, que je connais depuis qu’il est gamin, s’y était également inscrit. J’avais assez mal nagé ce jour-là et souffert de la chaleur mais je ne m’en étais pas trop mal sorti et je m’étais surpris, 10 secondes après avoir passé la ligne, à m’inquiéter de savoir si Saad, c’est son petit nom, était devant ou derrière moi. Notre amicale rivalité est sans doute née à ce moment-là. J’empochais néanmoins, dans la bonne humeur, la première manche. Il avait nagé et couru plus vite que moi mais sans entrainement et avec un vélo pourri, sa partie cyclisme avait été un vrai chemin de croix et j’avais fini avec une avance assez confortable.

Rendez-vous était pris pour l’année suivante mais le triathlon de Paris a été annulé et nous nous sommes rabattus sur le triathlon de la Reine, à Versailles, un format sprint qui nous a permis d’attirer de nombreux néophytes dont ma grande. En un an Saad avait eu le temps de retenir la leçon, s’était équipé d’un vélo en carbone et avait nagé un peu plus souvent. Pas assez sans doute et heureusement pour moi, c’est cette fois la partie nage qui lui avait fait faire perdre beaucoup de temps et m’avait donné suffisamment d’avance pour qu’il ne me reprenne pas en course à pied. Il ne passa la ligne qu’une toute petite minute après moi et je sentis bien que proche était le moment ou c’est lui qui m’accueillerait avec le sourire au passage de la ligne.

Rendez-vous fut pris pour 2025 et la fête devait être belle. Sur le papier, une bonne dizaine de potes de tous horizons était chauds pour venir se joindre à notre petit concours de testostérone mais cette fois, c’est le triathlon de Versailles qui a été annulé. Le sort s’acharne. Après avoir pas mal tergiversé, nous nous rabattons donc sur le triathlon du Nautil qui sur le papier devrait séduire tous nos potes néophytes : la nage se fait en piscine, ce qui est soft, le parcours vélo est court et à peu près plat, la course à pied en théorie sans difficulté. Autre particularité, il a lieu un jeudi. Férié certes, mais un jeudi quand même et surtout, c’est au fin fond de la pampa et au final nous ne sommes que 5 à relever le défi. Saad bien sûr qui cette année est plutôt concentré sur son 70.3 à venir, Vincent qui me colle un bon quart d’heure dans la vue sur à peu près tous les formats de courses et dans globalement tous les sports, Jam qui avait déjà fait Versailles l’an dernier et un pote à lui qui s’essaye pour la première fois au triple effort. Tout est en place pour la troisième manche de notre petit derby lilasien.

C’est parti

En piscine, je perds l’avantage de la combi qui porte mes grosses cuisses mais je gagne la poussée au mur et la coulée que je maîtrise pas trop mal. Nous sommes 7 dans la ligne d’eau. En théorie, Saad nage plus vite que moi, mais nous avons mis exactement le même temps de référence lors de l’inscription pour être sûrs de partir dans la même vague. Il se place dans la ligne d’à côté et nous patientons jusqu’au départ, que je rate.

Ces quelques secondes perdues sont contrariantes car en sprint, quelques secondes, c’est quelques places au classement. Je me retrouve derrière deux balourds qui non seulement n’avancent pas mais qui surtout semblent faire tout leur possible pour m’empêcher de les passer. Cette nage en piscine est encore plus violente qu’en eau libre. Je suis furieux et tente de passer en force en y laissant un peu d’énergie. Je passe, pousse comme un bourrin sur le mur et grâce à une bonne coulée, remonte deux autres nageurs et les dépasse. Heureusement que ma montre compte les longueurs car au bout de 3 minutes, je ne sais déjà plus où j’en suis. C’est très compliqué pour doubler car les nageurs occupent toute la largeur du couloir. Sur une des poussées, je ne peux même pas trouver un centimètre de mur disponible, je fais donc ma poussée dans le ventre d’un autre nageur. Petit tip au passage, ne faites pas ça, c’est mou et pas du tout efficace. Au bout d’un moment, ils fatiguent et j’ai enfin du champ pour nager. J’ai la niaque et je sens que j’avance pas si mal. Je finis les 575 m en ayant tourné autour de 2 minutes et quelques secondes au 100 mètres, soit ma meilleure allure, tous triathlons confondus. J’en profite pour pulvériser mon RP sur 400 mètres, c’est toujours ça de pris.

Mes filles me hurlent que Saad est juste devant, je file au parc à vélos, repère le mien tout de suite vu que j’ai pu choisir de le mettre où je voulais, ce qui est top, puis cours vers la sortie. Et c’est dans ce quatrième sport, la transition, que tout va de nouveau se jouer. Avec l’expérience, je sais que c’est là que les débutants, quel que soit leur niveau sportif, perdent le plus de temps. À enfiler des chaussettes et faire leurs lacets, à chercher leur vélo, à mettre leur casque à l’envers (véridique) ou à enfiler des gants sur des mains mouillées. Rien de tout ça pour moi, tout est calé et je file vers la sortie du parc à vélo (enfin je file, façon de parler, je trotte comme je peux disons). Sauf que. Des fois ça veut pas. Je saute sur mon vélo et loupe complètement mon enfilage de chaussures. L’une d’elle se déclipe et tombe au sol. Je dois repartir en arrière pour la ramasser, chausser et remonter sur le vélo. Je suis furieux.

C’est re parti

Mikl sur son vélo

Une fois les chaussures attachées, j’appuie sur les pédales. J’ai peu de kilomètres au compteur cette année. L’an dernier j’avais beaucoup roulé pour préparer Nice mais pas cette année. Le drafting est autorisé mais il n’y a pas de densité. Les cyclistes que je rattrape n’avancent pas donc impossible de me mettre derrière eux et pendant deux tours (il y a 7 allers/retours à effectuer sur une route départementale fermée à la circulation) personne ne me double donc je roule seul. Au troisième tour, un duo pile dans la bonne allure me double et j’arrive à prendre leurs roues mais j’ai un peu l’impression qu’ils ne veulent pas de moi. Je passe devant pour prendre ma part mais le plus jeune fait immédiatement l’effort pour repasser devant et l’autre fait des signes avec ses mains que je ne comprends pas. J’ai bien envie de me caler derrière et de rouler en ratagasse pendant les 4 tours qui restent mais ce n’est pas dans mes gènes et à leur première attaque, je décide de ne pas les suivre et les laisse filer. Plus personne ne me doublera jusqu’à ce que j’en finisse. À la fin de mon dernier tour, j’aperçois enfin Saad qui attaque le sien. Je lui ai donc mis presqu’un tour complet en vélo soit à vue de nez, 4 ou 5 minutes. C’est ric et rac car en course à pied, s’il est en forme il peut me mettre 1 min au kilomètre sans transpirer. Ça va encore être tendu.

C’est (à peu près) re parti

Ma seconde transition est bizarre. Je pose vélo et casque, enfile mes chaussures à toute vitesse mais au lieu de filer, je bugge sur mes lunettes de natation que je décide de ramasser alors qu’elles sont très bien là où elles sont, pour les mettre dans mon casque. Je réfléchis à ce que je vais faire de mon gel, regarde mon bandeau d’un air stupide… Encore une poignée de secondes bêtement perdues. Je me ressaisis et me mets à courir. J’arrive devant la bénévole, lui demande par où on sort, elle me dit « par là » en me montrant la droite, je pars à gauche. « Mais non pas par-là » me crie-t’elle moitié hallucinée, moitié morte de rire. Je me trompe ensuite de bouton sur ma montre et l’arrête par erreur. « Tu vas arrêter tes conneries oui ? » me gueule-je dessus ! Je relance la montre, ajuste mon bandeau, rentre mon ventre pour les photos et me mets à courir. Enfin.

Cette fois, c’est re re parti !

Je cours. Objectif, coller le plus possible à mon allure 10 km soit un poil moins de 5 min au kilomètre. Je suis à 5’05 et je me sens bien à cette allure. Si je la tiens, Saad ne peut mathématiquement pas me reprendre. Mais au bout de trois minutes, le bitume disparait et laisse place à un chemin de terre en faux plat très légèrement montant. Rien de méchant mais je ne parviens pas à tenir mon allure. Le chemin devient ensuite un chemin d’herbe puis après une nouvelle bosse cassante, un chemin pour chevaux en copeaux de bois. Même sensation que quand j’ai poussé dans le ventre de l’autre à la piscine. Je m’enfonce. Ma montre indique que je suis en 5’55 au kilomètre. Trop lent, faut que je me ressaisisse. Je me retourne malgré moi, rien derrière, personne en vue. Je sors des copeaux et reprends de la vitesse, je suis en jambe, j’accélère. Je finis le premier tour, mes filles me hurlent que Saad est à ma poursuite, je repars pour le second tour et remonte un peu l’allure jusqu’à ce que ça redevienne terreux. Je le croise alors, j’ai à peine une minute d’avance. Je lui dit qu’il va me fumer car je suis cuit et je m’attends à ce moment redouté où il va passer et où je sais que je ne pourrais pas le suivre. Toutes les deux ou trois minutes, j’entends le souffle d’un coureur qui se rapproche et chaque fois, je ne peux m’empêcher de me retourner mais ce n’est jamais lui. Arrivé dans les copeaux, je vise le bas-côté en terre. C’est moins pire. Je suis mort mais je m’accroche. Je sais qu’après les copeaux, je pourrais allonger ma foulée. C’est long mais c’est libre derrière. J’arrive enfin sur le bitume et je vois mes filles et ma chérie on fire. Elles me hurlent qu’il est juste derrière, je vois l’arche. J’allonge la foulée et cours aussi vite que j’en suis capable (j’ai vu la vidéo, c’est moche) mais Saad m’a vu trop tard et malgré son sprint impressionnant il ne passe la ligne que 4 petites secondes après moi.

« Encore apprendre tu dois, jeune padawan 🙂 »

Une fois remis de mes émotions, je vois Vincent qui est déjà douché et changé. Certes il est parti dans la vague d’avant mais il m’a quand même mis 8 minutes dans la vue. Il finit 30e (et 3e Master 3) sur 156. Saad et moi respectivement 62e et 63e. Nous attendons ensuite Jam et Felix qui arrivent un peu après. Félix a fait une belle course mais il a fait un tour de trop en vélo et un aller-retour de trop en natation. Jam quant à lui a eu des crampes et a du s’arrêter de longues minutes pour les faire passer.  

Au final, cette petite virée au fin fond de la Brie aura été plus que sympa. La course est merveilleusement bien organisée, le fait de nager en piscine n’est pas désagréable, le temps était parfait et j’ai un an de réserve de vannes. Vivement l’année prochaine.