Deux très longs kilomètres et demi
Il y a un an tout juste, j’ai décidé de me mettre sérieusement à la natation avec l’idée de participer à mes premiers triathlons. Partant de très loin, j’ai assez vite progressé et presque aussi vite stagné car la natation est un sport où la technique a une grande importance. Et je n’ai jamais été un grand technicien. Cependant, j’ai assez rapidement atteint le niveau que je m’étais fixé, à savoir être capable de nager les distances des triathlons S et M : 750 et 1500 mètres.
Les résultats ont suivi, plus qu’encourageants, entrainant une certaine euphorie. Après avoir fini dans la première moitié du classement de ma première course de nage en eau libre, je m’étais scotché moi même en faisant un classement tout à fait sidérant au triathlon de Paris. Grisant. Se retrouver, deux fois de suite, dans le haut, voire le très haut du classement avait quelque chose de magique. Et comme c’était trop beau pour être vrai, ça n’a évidement pas duré 🙂 .
Après une contre performance sans appel sur mon second triathlon, il y ‘avait de bonnes chances que ça soit encore pire sur la compétition du jour, un 2500 mètres en eau libre dans le bassin de la Villette. Cette distance, je ne l’ai jamais nagée. En piscine, mes plus grosses séances font 2000 mètres, avec des pauses entre les séries. En mer j’ai nagé une fois 2100 mètres mais le sel offre une très bonne portance et là, on sera en eau douce. Crade, mais douce.
En surfant sur l’Intranet du boulot, je tombe sur cette course qui a lieu le seul week-end de septembre où je suis libre. Vu que c’est gratos, je ne réfléchis pas trop longtemps et après avoir un peu hésité entre 1250 et 2500 mètres , j’opte pour le format défi, trouvant ça motivant de me frotter à une distance encore jamais parcourue.
Vu mon état en sortant de l’eau la semaine dernière après seulement 750 mètres, j’ai prévu d’y aller tranquille. J’ai trois objectifs. Déjà, ne pas finir affalé sur un kayak de secours mais franchement, j’estime pouvoir nager 2,5 km sans trop de problèmes. Le second est de ne pas finir dernier parce que je déteste ça. Enfin, j’estime pouvoir boucler la distance en un peu moins d’1h10 et j’espère finir le plus proche possible de l’heure. Moins d’1h05, par exemple, m’irait très bien.
C’est parti
Je me suis calé derrière tout le monde pour partir dernier en me disant qu’il y aura bien des plus lents que moi à doubler. Y’en avait. Mais pas beaucoup. D’autant que j’ai très mal nagé. L’eau est fraiche, je ne suis pas en forme. Je suis content d’être là mais je ne trouve pas mon rythme, chaque nageur qui me frôle me fait sursauter alors que je commence à être habitué à la nage en troupeau et que l’ambiance est, en comparaison d’un triathlon, assez chevaleresque.
Je n’ai pas le parcours dans l’oeil, mes trajectoires sont moches et je n’arrête pas de boire de l’eau. Je suis assez vite seul et je me raisonne pour ne pas accélérer. Je dois d’abord retrouver ma nage, mais voila, je ne suis pas un grand nageur et rien n’est automatique dans ma façon de me déplacer sur l’eau. Je dois penser à ce que je fais, rien n’est naturel. Si je rêvasse, je tape l’eau, j’oublie de souffler, de rentrer ma tête, de me grandir, de battre des pieds. La baleine quoi. Le premier tour est épique, surtout qu’à environ 300 mètres de la fin, les élites, plusieurs champions de France ainsi que les nageuses de l’équipe nationale du Danemark, finissant leur second tour, me mettent une pression folle. Ils remuent des tonnes d’eau, passent à des vitesses ahurissantes, c’est plus que démoralisant et j’ai beaucoup de mal à me re concentrer et faire abstraction.
J’attaque le second tour sans conviction. Mon virage aux bouées est catastrophique, je n’avance pas et ça m’énerve. Finalement, je trouve mon second souffle. Le parcours, maintenant, je le connais et j’arrive enfin à enchainer plusieurs centaines de mouvements sans avoir à sortir la tête pour me rassurer sur ma trajectoire. Ça va beaucoup mieux et je sens que j’avance plus vite mais il n’y plus personne autour de moi. J’ai du mal à voir s’il reste du monde derrière moi mais je me convaincs qu’il y en a forcément un ou deux qui trainent dans le fond.
Dernière longue ligne droite, presque 500 mètres. J’ai retrouvé un peu de nage, je décide d’accélérer et tant pis pour la prudence, au pire je finirai en apnée 🙂 . C’est long mais je ne faiblis pas. J’aperçois Sophie sur le quai qui m’encourage, alors j’accélère encore et parviens même à doubler deux nageurs attardés avant de passer la ligne avec un petit pincement car j’en avais encore sous le pied et que mon second tour acceptable ne rattrapera pas le premier.
Je finis en 1h13, 209e/215 (158e homme sur 161) soit pas dernier, mais vraiment pas loin. Je ne sais pas trop quoi en penser. J’ai fini, je ne me suis pas noyé et j’ai bouclé un 2500 mètres en eau libre, qui n’est quand même pas une distance qui s’improvise mais que c’est dur que d’arriver à s’en satisfaire…
Mais bon, comme une course chasse l’autre, il est déjà temps de commencer à penser aux 20 km de Paris. L’an dernier, j’avais tellement déconné que je n’en avais même pas fait de récit. Faire mieux ne devrait pas être difficile…
© crédit photo : Sophie