Barbotage dans l’eau verdâtre du canal de l’Ourcq
Ce dimanche, y’avait course. L’Open swim star, c’est son petit nom. Une compétition de nage en eau libre (comprendre hors piscine) qui consiste à se jeter dans l’eau trouble du bassin de la Villette et à affronter 200 autres nageurs et nageuses surexcités en essayant de ne pas se noyer.
Mais que diable était-il venu faire dans cette galère me demanderez-vous ? Eh bien figurez-vous que depuis le début de l’année scolaire, je nage. Une ou deux fois par semaine même, avec beaucoup d’assiduité. Et du crawl en plus. Mais oui. J’m’y suis mis.
Après 44 ans de brasse, j’ai décidé de me frotter à la nage libre, non par amour des carreaux et du chlore mais avec l’idée de m’aligner cet été sur le triathlon de Paris.
J’ai donc beaucoup nagé, beaucoup progressé et je suis parvenu à plusieurs reprises à nager un kilomètre en piscine sans interruption en améliorant à chaque fois mon temps pour finalement stagner aux alentours de 23 minutes. À ce moment là du récit, je suis incapable de dire si c’est bien ou pas mais c’est assez loin de la barrière horaire de la course qui fixe un temps maxi de 40 minutes.
Lorsque je vois passer sur l’intranet du boulot qu’il y a des places gratos pour cette course mon sang ne fait qu’un tour et après avoir hésité à faire le 2km, je me décide à m’inscrire sur le 1 km, distance que je sais pouvoir tenir. L’idée est aussi de tester le matos pour le triathlon et de me frotter à la nage en troupeau.
Me voilà donc planté sur les bords du bassin de la Villette, cintré dans une tri-fonction recouverte d’une combinaison néoprène de nage que j’étrenne et de mon petit bonnet rose. Je n’ai pas de photo et je suis inconsolable car objectivement, moulé ainsi des pieds à la tête, j’étais beau comme un Dieu grec.
Tout est merveilleusement bien organisé et le speaker annonce une eau à 18°C. C’est grosso modo la température de la Manche en été. Frais mais pas désagréable et avec la combi, ça sera parfait. Je saute à l’eau et suis un peu saisi quand même. Fraiche elle l’est. Je me dirige vers le milieu du bassin et me retrouve à devoir activer mes petites jambes pour me maintenir à la surface car je n’ai évidemment, j’ai pas pied. Je gère mal ce temps d’attente qui heureusement ne dure que quelques instants.
C’est parti
Ça date un peu mais je me souviens encore de ce jour épique où j’avais nagé dans la Seine quelques dizaines de mètres. Je ne suis donc pas surpris par l’ambiance « troupeau de vaches » et je gère mon début de course avec plus de facilité que prévu. La combi aide clairement à nager et je sens bien que je suis plus facile qu’à la piscine. Malheureusement je gère mal l’effort par manque d’expérience et je pars un poil trop vite. Je suis bien calé entre deux nageurs du même niveau que moi et j’en oublie presque la promiscuité des autres quand je suis rapidement rappelé à la réalité par un olibrius qui me grimpe littéralement dessus pour passer entre moi et le nageur qui est à ma droite. Je le dégage d’un coup d’épaule et accélère pour me sortir du paquet mais ce tout petit effort suffit à m’essouffler et je ne parviendrai jamais vraiment à reprendre un souffle normal. J’arrive à la bouée des 500 mètres toujours essoufflé mais j’ai une bonne trajectoire qui me permet de prendre le virage bien serré et de relancer. Je me retrouve donc face à mes suiveurs et ils sont encore très nombreux.
Je suis toujours essoufflé mais je me fais désormais assez peu doubler. Si seulement je pouvais reprendre mon souffle et dérouler. Je tente quelques mouvements de brasse mais nager la brasse avec une combi néoprène est presque impossible. Dès que je brasse, je perds 5 places, donc je m’astreins à nager en crawl et je repasse immédiatement tous ceux qui m’ont doublé. Je joue au chat et à la souris avec quelques nageurs qui m’entourent dont un qui nage probablement plus vite que moi mais qui est complètement cramé, il se met sur le dos quand je brasse et re crawl quand je crawl. Il m’énerve.
Je vois l’arche, il reste 50 mètres, je décide de sprinter pour le laisser sur place, lui et le type qui me colle aux basques depuis la bouée. Je finis en apnée, le cœur dans la bouche mais ils ne me rattraperont jamais. Je sors de l’eau éreinté mais il me faut moins d’une minute pour récupérer. Je n’ai pas mon chrono, j’ai oublié de couper ma montre mais je sais que j’ai fait moins de 25 minutes et je vois un paquet de nageurs encore dans l’eau. Je n’en reviens pas.
Au final je finis dans la première moitié du tableau, 108e sur 220 au scratch et 15e dans ma catégorie d’âge en 24’20. Le gagnant, un Anglais d’une soixantaine d’années a mis 13 minutes. Ça me laisse rêveur.
Au final je suis vraiment ravi, la combi est nickelle, la trifonction aussi, les lunettes miroirs m’ont parfaitement protégé du soleil, j’ai fait un temps et un classement que je n’aurais jamais osé espérer il y a un an. Et si je dois bien admettre que j’ai bu deux trois gorgées de cette eau infecte, je n’ai pas été malade. Et je ne me suis pas noyé. 😀