Mais pas que.
J’ai commencé la plongée sous-marine il y a une vingtaine d’années mais cela ne fait que quelques années, cinq ou six tout au plus, que j’ai pris l’habitude de toujours emmener avec moi un appareil photo que je protège de l’eau et de la pression en l’enfermant dans un boitier étanche et solide que l’on appelle un caisson.
J’ai débuté la photo sous-marine avec un petit caisson Canon, spécialement conçu pour mon compact de l’époque, un Ixus 70 pour ne pas le nommer. Un appareil de milieu de gamme très correct et proposant un mode sous-marin honnête. J’ai néanmoins très vite été bloqué par l’absence de lumière. J’ai acheté une lampe mais je me suis trompé en l’achetant et avec son faisceau étroit je n’ai jamais vraiment pu éclairer correctement mes scènes sous-marines. Je me suis fait offrir un très chouette phare mais il n’est pas adapté à la photo.
Les images que j’ai ramenées avec cet appareil sont tout juste correctes et ce dernier a très vite montré ses limites. Lors de ma 100e plongée, je l’ai emmené pour la première fois un petit peu au-delà de 40 mètres et il n’a pas du tout aimé cela. Là, c’est le caisson qui à montré ses limites. Les petits caissons Canon sont de bonnes entrées de gamme mais ils ne sont pas prévus pour la plongée profonde.
Ouvrons donc une large parenthèse car il se trouve que moi non plus je ne suis pas prévu pour cela. Les grandes profondeurs ne m’ont jamais vraiment attiré et continuent à me faire un peu peur. Au-delà de 45 mètres, on entre dans un autre monde.
Comme je vous le disais plus haut, j’ai donc passé le niveau 1 il y a 20 ans. Il m’autorisait à aller plonger à vingt mètres de profondeur et c’était très bien comme ça. J’ai très vite enchaîné sur le niveau 2 qui lui me permettait d’aller à 40 mètres avec le confort extrême d’être obligatoirement encadré par un moniteur ou un guide de palanquée.
Je m’en suis contenté pendant de nombreuses années. Je n’avais pas de raison particulière de passer mon niveau 3 et absolument pas le niveau pour envisager le N4.
Il faut savoir que pendant très longtemps, il a été possible, après le niveau 2, de choisir d’aller vers le N3 ou le N4. Les N3 sont des plongeurs totalement autonomes jusqu’à 60 mètres mais ils ne peuvent pas encadrer des N1 ou des N2. Pas très intéressant pour les clubs qui préféraient donc former des N4, bien plus utiles car pouvant encadrer.
Le N3 attirait surtout des plongeurs vivant près de la mer et ayant leur propre bateau ou des personnes ayant un binôme attitré avec qui ils voulaient pouvoir plonger quelle que soit la configuration de la sortie, ce qui n’était pas du tout mon cas. Et puis entre zéro et 40 mètres, il y a quand même un paquet de trucs à voir. Sans parler de la tolérance de 5 mètres permettant d’aller taquiner les 45 mètres quand les conditions étaient très bonnes, ce qui m’a permis de faire quelques plongées mémorables, notamment sur le Campéador et surtout le St Brandan, un cargo anglais posé bien droit sur sa quille par 44 mètres de fond qui est sans aucun doute l’un de mes meilleurs souvenirs sous-marins.
Il y a quelques années, la réglementation a changé. La tolérance de 5 mètres a disparu et le N4 n’a plus été accessible dés le N2. Les clubs se sont donc mis, contraints et forcés, à former des N3 et je me suis retrouvé parfois isolé. Lorsqu’à cause de moi (seul N2 ce jour là) une plongée sur le St Brandan a été annulée et transformée en plongée sur l’USSA que j’avais déjà visité à 10 reprises, je me suis dit qu’il était peut être temps de sauter le pas. Et puis mes derniers entraînements remontant à plus de quinze ans, une remise à niveau technique commençait à devenir indispensable.
Je me suis donc mis en tête de passer ce fameux N3 et quelle galère ce fut. J’ai commencé par le planter. pas lamentablement mais pas loin.
Après une courte phase de découragement, j’ai intégré un club parisien et me suis entraîné très sérieusement. Les mauvaises habitudes accumulées au cours de 18 années de plongées irrégulières et d’absence d’entraînement technique ont commencé à laisser place à une technique un peu plus propre. J’ai donc beaucoup plongé, mais sans appareil photo car lorsqu’on passe ou prépare le N3 on ne fait pas vraiment de tourisme. Je n’ai ressorti mon caisson qu’au mois d’avril dernier, lors d’un court week-end à St Malo.
Mais oublions cela et reparlons photo. Ou plutôt matos. Ça faisait donc une paire d’années que J’avais prévu de m’équiper d’un nouveau compact et d’un nouveau caisson avec flash déporté, bras télescopique, globe macro et tout le toutim. Cela faisait longtemps que je n’avais pas acheté de matériel photo et j’avais donc envie de. Je n’y pensais absolument pas au mois de novembre, lorsqu’en tentant de photographier une banale boite aux lettres londonienne, un gentleman pressé me bouscula à l’instant même ou je déclenchais mon reflex 300D antédiluvien, un appareil merveilleux mais dont l’obturateur, connu pour sa fragilité rendit l’âme instantanément. J’étais inconsolable.
De retour à Paris, j’écumais les forums à la recherche de la solution au meilleur rapport qualité prix et je mis des lustres à me décider. Le choix raisonnable eut été d’opter pour un G12 et son caisson. Fini les reflex d’une tonne et fini les compacts trop décevants. Un seul appareil, fabuleux pour les photos sous-marines, excellent pour les photos de surface. Mais bon. Tout le monde connaît cette phrase d’Oscar Wilde : « Le seul moyen de se délivrer de la tentation, c’est d’y céder. » J’ai lu plusieurs fois le Portrait de Dorian Gray et j’ai beau fouiller dans ma mémoire, je suis presque certain que cela ne concernait pas les achats compulsifs d’appareils photos mais je me suis tout de même approprié cette citation et c’est sans le moindre regret que je suis ressorti de la Fnac avec un nouveau boitier reflex 60D, renonçant de fait, mais temporairement, à changer d’appareil sous-marin. 3 mois plus tard, me voila donc à St Malo avec mon petit compact habituel et son caisson irréprochable.
Alors, acte manqué ? Prise de pouvoir de mon inconscient sur mon subconscient ? De St Malo je ne ramènerai aucune image. D’une part parce que nous avons eu la visibilité la plus exécrable qui puisse être (à ne pas voir ses propres palmes) et d’autre part parce qu’en fermant mal mon caisson, j’ai noyé mon Ixus. Philosophe, je me suis dit que c’était inéluctable, qu’il avait eu une belle vie, fait de belles images mais qu’il était voué, un jour ou l’autre à laisser la place à meilleur que lui.
Nouvelle phase de réflexion, le budget photo n’étant pas extensible et nouvelles hésitations. J’évacue très vite l’idée d’acheter un caisson pour mon reflex. Rien que d’y penser j’en ai des frissons dans le bas du dos. Acheter un G12 ? Trop gros pour madame qui l’utilisera en surface puisque de mon coté, j’utilise mon reflex dès que j’ai les pieds au sec. J’opte finalement pour un S110, la Rolls des compacts. Pour le coup, je culpabilise un peu car seulement trois mois après avoir acheté un 60D, ça commence à faire un peu beaucoup. D’autant qu’il me faut maintenant lui trouver un caisson.
Reprendre un Canon dédié ? C’est probablement ce que j’aurais fait si je n’avais pas été en formation N3 mais au moment de cliquer sur « valider », je me souviens que ces caissons ne vont qu’à 40 mètres et que je serais bientôt autorisé à descendre bien en deçà. J’opte donc pour un caisson Ikélite qui est censé pouvoir me suivre à 60 mètres. Je pars avec en Thaïlande et rate toutes mes photos. Le s110 est un merveilleux appareil mais le caisson est une vraie purge et se bloque constamment. À force de m’énerver dessus, j’en oublie le B-a-ba et me retrouve même en rade de batterie lorsque So se retrouve nez à nez avec une énorme tortue brune au large de Koh Chang. Dans 12 mètres d’eau. Ne lui en parlez pas, je crois bien qu’elle m’en veut encore.
Après un aller/retour au magasin qui me l’a vendu, je repars plonger pour cette fois passer et obtenir enfin mon N3. Une fois le brevet en poche, nous l’étrennons sur une plongée en autonomie à 30 mètres mais de gros problèmes de matériel m’accaparent et je ne prends que quelques photos. Je repars en ensuite en Espagne où je prends une centaine de photos mais toujours dans la zone des 30 / 40 mètres et il me tarde de le tester enfin sur une plongée plus profonde.
Puis arrive enfin la bonne nouvelle. Je pars plonger sur le Donator, une épave mythique qui repose sur 48 mètres de fond.
Coup de bambou, la veille au soir, j’apprends qu’il n’y a que 10 places sur le bateau et qu’au jeu des critères d’ancienneté dans le club, et après défections je suis en 11e ou 12e position, donc à une mauvaise position. J’envisage un temps de bâillonner mon binôme pour prendre sa place mais je préférè ruminer dans mon coin. Il est dit que je n’irai donc pas sur le Donator, ni avec mon caisson, ni sans.
Le matin, je suis d’assez mauvaise humeur mais ça n’est pas une excuse. Je prépare mon matos, replace mon s110 dans son caisson et le fourre au fond de mon sac sans vérifier l’étanchéité. Je suis à la bourre. Nous devrons ce matin, nous contenter d’un sec, le sec Pascal, un très joli site de plongée du coin. Je m’équipe, saute à l’eau et noie mon S110 dans 5 mètres d’eau.
VDM !
© crédit photo : toutes les photos sont de moi, bien évidement, à part la dernière prise par un technicien du SAV de Canon…